LPQP

42 rue Gambetta

50200 Coutances

lepoirierquipenche@gmail.com

instagram.com/le_poirier_qui_penche

           Si l’emblématique poirier couché au fond du jardin a naturellement donné son nom à l’espace d’exposition, le Poirier qui Penche est surtout une référence au célèbre Pou qui Grimpe qui sévissait à Coutances dans les années 1920. Réunissant Joseph Quesnel, René Jouenne et Jean Thézeloup, ces artistes et poètes subversifs fondateurs du Pou qui Grimpe auront su défendre l’art populaire et faire rayonner culturellement la ville de Coutances. Ainsi, le Poirier Qui Penche s’inscrit dans cette tradition à la fois historique, patrimoniale et culturelle qui sont les fondements de la ville de Coutances et cherche par son action à contribuer au développement et à l’élargissement de ce dynamisme culturel.

Située au cœur de Coutances et lieu de passage vers le centre-ville pour les habitants des quartiers Vaudon et Claires-Fontaines, l’ancienne épicerie de la rue Gambetta à l’abandon pendant une quarantaine d’années s’est peu à peu convertie en un espace  d’exposition dédié à l’art contemporain.

La nécessité de créer un espace comme Le Poirier qui Penche est à mettre en relation avec l’arrivée massive d’un grand nombre d’habitants sur le territoire liée au contexte de la crise sanitaire. Parmi eux, des artistes qui opèrent un retour aux sources après de nombreuses années passées ailleurs. Venus de Berlin, de Marseille, de Paris… tous originaires de la Manche, ils sont riches de leurs expériences et de leur parcours artistique et offrent un point de vue singulier sur leur région d’origine. Par ailleurs, beaucoup d’artistes vivent et travaillent sur ce territoire depuis toujours, souvent des femmes. Tous portent un regard particulier sur leur environnement. On le voit dans les œuvres qu’ils  proposent (la notion de paysage y est récurrente), à  travers les matériaux qu’ils utilisent (des algues, de la tangue, de l’osier…) ou dans les gestes qu’ils produisent (utilisant ou détournant ceux de l’artisan ou du paysan). En ceci, ils nous questionnent sur notre histoire et les traditions populaires, sur la ruralité et l’imaginaire qu’elle suscite en même temps que sa réalité puisqu’ils y vivent et y sont confrontés. Plus largement, ils portent un regard critique sur les enjeux politiques, sociaux et environnementaux dont on ne peut s’abstenir aujourd’hui.

EXPOSITION A VENIR

LPQP 11

Une manière singulière d’entrer dans la complexité du travail d’un artiste par le biais de son jardin.

Où l’on considérera le jardin comme un espace intime et vecteur des sensibilités de chacun.

Où l’on proposera de voir le jardin comme le révélateur d’un positionnement et d’une démarche artistique.

Samedi 18 mai

43 route de Saint-Malo de la Lande à Agon-Coutainville – Entrée du jardin et possibilité de se garer rue de la Flague

Dimanche 19 mai

La Galotière, 19 rue du Val de Soule à Bricqueville-la-Blouette 

Entrée libre et gratuite

Le jardin avec vue de Stephan Guillais

Voir l’exposition LPQP 8 – Peindre à tout bout de Champ

Le jardin mobile de Sophie Hutin

Voir l’exposition LPQP 2 – Comète

Le jardin fou de Virginie Hervieu

Voir l’exposition LPQP 5 – Contrepoint

Le jardin stupide de SP38

Voir l’exposition LPQP 7 – Dehors

EXPOSITIONS 2024

LPQP 10

Agnès Barthé

Tropisme, 2000-2024

Fil de lin, cordot, ficelle, laine, dimensions variables    

      

Anne-Marie Quellet

Pluie encore !

Raphia, papyrus, laine, 43 x 27 cm    

Rythmes – Hommage à Paul Klee – Mini-tapis VIII, 2021

Carton, plumes d’encornet, laine, fil à coudre, 21 x 13,5 cm    

          

Olivia Pradel

Bol, 2023

Plâtre, polypropylène (ficelle agricole), 25 x 20 x 14 cm                

Les Nids, 2024

Chanvre, terre, dimensions variables                   

Vues de l’exposition Du fil à retordre

instagram.com/mariebaff

Agnès Barthé

virginiehervieu.wordpress.cominstagram.com/virginie_hervieu

instagram.com/sophie_hutin

Anne-Marie Quellet

https://www.olivia-pradel.com/ – instagram.com/olivia.pradel

Marie Baffard

Sans titre 1/4, 2023

Paille de seigle et fils de récupération (coton, polyamide, polyester), 26 x 60 cm             

Champs printemps 3/3, 2023

Paille de blé et fils de récupération (lin, coton), 13 x 56 cm

Coucher des cimes 3/4, 2023

Paille de seigle et fils de récupération (lin, coton), 18 x 53 cm

           

Virginie Hervieu

Sans titre, 2018 Fil à coudre, 10 x 10 x 0,5 cm

Sans titre, 2024 Laine, 120 x 220 x 12 cm

Sophie Hutin

Fibre (extrait de l’installation), 2011

Fil de cordage de pêche, dimensions variables (h : 220 cm)

Jarre, 2024

Fil de cordage de pêche coloré, 45 x 35 x 33 cm 

Sophie Hutin

Louches, 2013 – Fil de cordage de pêche, dimensions variables

Marie Baffard

Matto 1/6, 2018

Fil polyester et fil ferrari (polyamide), 50 x 25 cm               

Matto 2/6, 2018

Lin, fil ferrari (polyamide) et fil ferrari mélangé (lin et polyamide), 50 x 25 cm 

                 

Sophie Hutin

Vésicules (extrait de la série), 2023 Fil de cordage de pêche, 30 x 13 x 5 cm               

Anne-Marie Quellet

Divagation

Raphia, bambou, papyrus, 54 x 54 cm   

       

Olivia Pradel

Trace d’humain, 2024

Toison de mouton, peinture, 25 x 19 cm  

         

Virginie Hervieu

Sans titre, 2024

Fil à coudre, 170 x 90 x 10 cm

Marie Baffard

Echange avec les cimes, 2020

Aiguilles de pin, lin, coton, 52 x 34 cm

                 

Anne-Marie Quellet

Habitat : Le Nid – Mini-tapisserie VII, 2021

Carton, laine, duvet, coton, 20 x 12,5 cm

Olivia Pradel

Tissage nomade, 2024

Saule, lin, 57 x 40 x 14 cm

Anne-Marie Quellet

Tissage VII – Le papillon, 2021

Lin, coton, laine, raphia, papyrus, fusain/cornouiller, 40 x 25 cm

       

Olivia Pradel

Bollocks, 2018

Poche de jeans, fil à coudre, 20 x 15 cm

https://www.ouest-france.fr/normandie/coutances-50200/a-coutances-une-expo-feminine-du-fil-a-retordre-au-poirier-qui-penche-jusquau-30-mars-2024-9675d50a-dec7-11ee-beb8-7f9af0132843

EXPOSITIONS 2023

LPQP 9 1/2

Accrochage en cours

Vue de l’exposition – 100 petits formats

www.stephanguillais.com

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virginiehervieu.wordpress.com

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instagram.com/sophie_hutin

Classe de 1ère option arts plastiques, Lycée Lebrun, Coutances

LPQP 9

Accrochage en cours

Olivia Pradel est née en 1988 en Suisse. Elle a étudié le design de mode, l’anthropologie et la construction textile en France, en Angleterre, en Inde et au Canada. Elle a dessiné et développé des collections pour des créateurs de mode basés à Londres et à Paris, avant de s’installer à son compte comme costumière, couturière et créatrice d’accessoires. Elle s’intéresse à de nombreux savoir-faire textiles, de la conception de l’étoffe à partir des fibres à la construction de vêtements et d’objets, en passant par la broderie, la teinture, le foulage, etc. 

En 2019, juste avant le confinement et la fermeture des frontières, elle quitte Montréal pour s’installer à Granville près des siens. Depuis, elle s’attache à valoriser la laine des moutons de pré-salé en fabriquant des tapis composés d’une matière tissée et foulée à partir de toisons brutes.

https://www.olivia-pradel.com/

https://www.olivia-pradel.com/la-boutique

instagram.com/olivia.pradel

Vernissage de l’exposition

Bout du Monde, 2022

Chanvre, laine, 85 x 150 cm

Tapis-Toison

Etonnant de rencontrer Olivia Pradel, toute petite dans son atelier au milieu de ses montagnes de laine. Elle est en train de trier des toisons de moutons. D’enlever les crottes, les herbes et les paquets de suint.

Olivia a remonté le temps. A la manière d’une anthropologue doublée d’un air d’enfant têtu, elle a décidé d’aller à rebours du progrès, de lutter contre l’obsolescence et de se confronter à un travail long et pas efficace. Elle cherche à refaire pour mieux les comprendre, les gestes millénaires du travail de la laine. Et ces gestes, il est nécessaire qu’elle les fasse tous : du soin des moutons aux finitions du tapis.

D’abord le tri, première étape du processus de travail. Il lui faudra ensuite laver la laine, la carder, la filer et préparer la chaîne de son métier pour parvenir au moment attendu, connu et recherché : le tissage.

Quand Olivia tisse, une mécanique se met en place et libère l’esprit. Femme et outil s’allient en rythme. Les gestes sont sûrs, rapides, accompagnés du claquement du peigne qui tasse la laine. Celle qui travaille atteint un état presque extatique, une sorte de transe ou d’hyperacuité qui permet l’invention et l’expérimentation : c’est pendant ces moments-là qu’un paysage se crée, redit dans la stratification des fils de trame du tissage.

Les tapis s’appellent Brume, Îlots, Bout du monde ou Sédiments, en référence aux paysages du bord de mer qui émerveillent Olivia. Cette capacité à l’émerveillement on la retrouve dans les matériaux qu’elle emploie et qui proviennent de ces mêmes paysages : la laine des moutons de pré salé ou les filets de polypropylène échoués sur les plages.

Olivia dit ne pas choisir de ce qui dans sa pratique relèverait d’un geste artistique ou d’un travail artisanal. Elle veut être libre de passer de l’un et à l’autre et aime alterner entre des temps de bouillonnements créatifs et des temps de réconfort, d’apaisement, qui sont ceux des gestes éprouvés.

C’est à nous qu’elle délègue le choix de poser ses tapis au sol ou de les accrocher au mur. D’en faire usage ou non. Le paysage sera toujours là : au sol, nous y entrerons littéralement, au mur nous le verrons comme une peinture uniste. En se dégageant de cette décision, elle nous oblige à regarder attentivement son travail. Et d’une certaine façon, elle nous défie : elle, croit en l’aspect salvateur du travail manuel et en la capacité de la création de ré-enraciner l’humain dans un rapport avec la beauté des matières et de la terre à l’ère de la dématérialisation imposée du travail. Par son travail, sa volonté et son humilité, elle nous prouve que cela est possible et nous conduit à nous interroger sur notre propre rapport au monde. Et surtout, elle nous offre la possibilité d’une réconciliation avec la nature et avec nous-même et nous donne du courage.

LPQP, texte de l’exposition, novembre 2023

Ilots, 2023

Laine et chanvre, 85 x 150 cm

Panier, 2023

Toison de mouton, fil à coudre

Vase, Nid et Bol, 2023

Plâtre, polypropylène (ficelle agricole)

LPQP 8 3/4

sans titre, 2023

Huile de lin, brou de noix, pigments, graines, charbon de bois sur aggloméré, 102 x 130 cm

virginiehervieu.wordpress.com

instagram.com/virginie_hervieu

LPQP 8

Accrochage en cours

Stephan Guillais est né à Caen en 1975. Il est franco-allemand et titulaire d’un Master de littérature et civilisation allemandes à Paris Sorbonne Nouvelle. Après avoir vécu en Allemagne et en Espagne, il revient vivre dans la Manche en 2014. Aujourd’hui, il vit et travaille à Agon-Coutainville.

www.stephanguillais.com

instagram.com/stephan.guillais

J’ai commencé la série Garden Combinations en mars 2019. Je présente ici quelques-unes des pièces les plus abouties ou les moins ratées si on veut. C’est la première fois de ma vie que je peins ce qui se rapprocherait le plus à des paysages, des « scènes d’extérieur ». Pour la première fois ce qui m’entoure au quotidien est entré dans ma peinture ; je l’ai constaté, a posteriori, au bout de 5 mois de travail. Ce n’est pas du tout une démarche consciente de ma part. C’est d’une banalité affligeante : le type qui peint ce qu’il a sous les yeux, tout un concept me direz-vous !

Le titre de la série fait allusion aux jardins au sens large, celui qui est le plus éloigné de la définition du dictionnaire : le jardin qu’on a la chance d’avoir ou celui dont on rêve, celui qui nous manque ou bien celui qu’on va visiter. C’est le jardin secret aussi ou bien même une certaine idée du jardin d’Eden peut-être. Le dehors, ce grand jardin qui nous entoure et nous accompagne, l’extérieur, là où on doit aller. Mes jardins sont aussi des jardins aquatiques, des scènes qui pourraient venir du monde marin, pour moi cela fait partie des jardins. Ici on voit des jardins clos par la limite de la toile ; en ce sens c’est la seule délimitation qu’ont subi ces jardins. Le jardin fait par la nature, pas nécessairement par nous. Des jardins pour nous.

Stephan Guillais, texte de l’exposition, Ecole municipale de dessin, Saint-Lô, octobre 2019

Vernissage de l’exposition, jeudi 14 septembre

Vernissage de l’exposition – photographies : Sanda Voîca

Sans titre, série Garden Combinaisons, 2019

Acrylique sur toile, 210 x 160 cm

Peindre à tout bout de champ

Stephan Guillais est peintre alors il peint, à l’acrylique sur de la toile ou du papier, c’est aussi simple que ça. Quoi de plus normal ou de plus évident !  Puis il ajoute comme par défi qu’il peint à tout bout de champ. L’expression provient me dit une rapide recherche sur internet de la manière dont les paysans au XIV siècle labouraient les champs en traçant des sillons d’un bout du champ à l’autre bout du champ. Elle est passée d’une notion spatiale à une notion temporelle désignant aujourd’hui une action répétitive et signifie : tout le temps, à chaque instant, sans arrêt, sans cesse…

Stephan Guillais peint de cette manière, toujours, inlassablement et son champ est très, très grand, infini même. Alors il ne s’arrête jamais de peindre.

C’est aussi une injonction qu’il se donne : « Tu dois peindre à tout bout de champ. »

Pourquoi peindre ainsi ? Et pourquoi s’y obliger ?

Pour ne pas oublier qui il est, ni d’où il vient ? Pour faire perdurer l’héritage reçu de sa mère, peintre avant lui ? Pour ne pas oublier le sens de sa vie, pour ne pas se perdre, lui ? Pour se rappeler que s’il peint, il doit le faire sérieusement, jusqu’au bout ?

Il peint sans cesse et il peint vite, le plus vite possible à cause du médium qu’il emploie, l’acrylique, qui sèche trop vite mais surtout il peint tout pendant qu’il le peut. Il peint vite pour que disparaissent les gestes du peintre. Arrivent des taches colorées, informes.

Le paysan sait bien pourquoi il laboure son champ mais que sait ou que cherche Stephan Guillais en s’imposant un tel travail ? Car au fur et à mesure qu’il peint, il range. Les toiles peintes sont enroulées et forment d’énormes tubes, les peintures sur papier s’empilent en tas dans l’attente d’une hypothétique exposition. Quoi faire de tout cela ? Tout semble insurmontable, vain ou inadapté : Peindre c’est comme chasser avec un arc et des flèches dans un appartement pour reprendre ses mots.

C’est en 2019 qu’il commence la magnifique série des Garden Combinaisons. Sur des morceaux de toile libre, des grands formats, il emploie pour la première fois la couleur. Elle arrive sans prévenir, pour elle-même. Des paysages naissent de ces taches de couleur réparties et superposées sur la toile. Il s’aperçoit aussi que ce qu’il peint c’est son propre jardin ou plus exactement le souvenir qu’il a de son jardin. Il reconnaît après coup tel buisson, l’orientation des arbres du verger ou la forme de l’arbre qu’il voit tous les jours par la fenêtre quand il fait la vaisselle. Il a coupé la haie devant la maison pour faire entrer le paysage dans son jardin. Un jardin suspendu d’où il peut voir la mer, la canopée des arbres et un ciel immense qu’il peint aussi. Ce paysage qu’il voit tous les jours c’est ce qui lui permet de continuer à vivre. Ce qu’il veut c’est peindre le bruissement du vent, la lumière dans les buissons.

Annie Dillard dans Pèlerinage à Tinker creek raconte la lecture qu’elle fait du livre de Marius Von Senden, Espace et Vision : Quand des chirurgiens découvrent qu’ils peuvent opérer et redonner la vue à des aveugles de naissance, ils consignent et analysent la perception sensorielle et la perception de l’espace de leur patients avant et après l’opération. Von Senden rassemble ces paroles : « La grande majorité des patients voient le monde comme un éblouissement de taches colorées […] Une petite fille en visitant un jardin s’arrête, muette, devant l’arbre, et ne peut le nommer qu’après l’avoir tenu avec ses mains, et ce qu’elle dit, c’est ‟ l’arbre avec toutes les lumières dedans ”. »

Annie Dillard poursuit son récit :

« Comment se fait-il que personne n’ait, dès le début, donné à ces gens qui viennent d’acquérir le sens de la vue, une boîte de peinture et des pinceaux, avant qu’ils ne sachent encore ce que sont les choses ? Alors peut-être pourrions-nous voir, nous aussi, des taches de couleurs, le monde démêlé de la raison, le jardin d’Eden, avant qu’Adam ne distribue des noms. Alors les écailles me tomberaient des yeux. Je verrais les arbres marcher comme si c’étaient des gens ; je me précipiterais dans la rue malgré tous les règlements, je pousserais de grands cris et je sauterais de joie. » 1

Stephan Guillais nous montre ces taches colorées. Celles que nous avons vues un jour car c’est aussi de cette manière que les très jeunes enfants perçoivent le monde quand ils ouvrent les yeux avant d’apprendre à voir, avant les mots. Un monde plat, fait de taches colorées ou brillantes, et de taches plus sombres pour les ombres. Un monde plat qui serait exactement l’épaisseur de la toile et coloré par la peinture même…

Stephan Guillais peint la peinture.  

Mais Stephan Guillais ne se contente pas de peindre la peinture, il peint aussi le fait de peindre. Tout est réuni sur la toile et tout se passe simultanément. Il nous montre la peinture en train de se faire et comment elle se fait ou comment il la fait. Ce temps-là, il nous le montre avec ces grandes rayures qui sillonnent sa toile qui ne sont pas sans rappeler les sillons du labour qui soulèvent la terre et qui laissent voir les différentes couches de peintures. Fausse perspective, hachurage, superposition, transparence perturbent le regard par des jeux optiques et obligent à un autre regard. Ainsi le peintre fait coïncider les deux notions spatiale et temporelle de la définition.

Stephan Guillais aime convoquer des figures héroïques, celle du Cow-boy ou de Rimbaud par exemple. En réalité, le héros, c’est lui, qui peint sans relâche, envers et contre tout. Alors je reprends pour finir une citation de Robin des Bois qui illustrait l’expression qui donne le titre de l’exposition :

 « Comment veux-tu que je dorme si tu gueules « Tout va bien » à tout bout de champ ? »

LPQP, texte de l’exposition, septembre 2023

1 Annie Dillard, Pèlerinage à Tinker Creek, Christian Bourgois éditeur, pages 56-58-59

Vue de l’exposition

Sans titre, série Skies, 2020

Acrylique sur toile, 89 x 75 cm

Sans titre, série Garden Combinaisons, 2019

Acrylique sur toile, 200 x 160 cm

Sans titre, série Speed Paintings, 2021

Acrylique sur papier, 100 x 75 cm

Sans titre, série Speed Paintings, 2021

Acrylique sur papier, 50 x 70 cm et 52 x 75 cm

Lire le texte de Sanda Voïca sur Stephan Guillais :

Celui qui peint plus vite que son ombre

LPQP 7

Sylvain Perier, dit SP38 est né en 1960 à Coutances.

Après avoir vécu à Paris puis à Berlin, il fait le choix, au printemps 2020 de revenir en Normandie, dans la maison familiale inoccupée pour y passer le confinement. Il vit désormais entre Berlin et Bricqueville-la-Blouette.

https://fr.wikipedia.org/wiki/SP_38

instagram.com/sp.38

DEHORS

Sylvain Perier est peintre. Dans son atelier, des papiers au sol ou roulés dans des étagères. Des gros tubes de peinture acrylique : du jaune, du magenta, du cyan, du vert, de l’or… qu’il utilise sans mélange,  directement.

Ces couleurs et ces papiers, il les affiche sur les murs de Coutances, de Paris, de Berlin, de Séoul, de Hong Kong, de Montréal, de Bruxelles, de Varsovie… On y lit dans cette typographie tout en longueur qu’il a créé : VIVEMENT VIVEMENT, RÊVE, WAR NO ou GREVOLUTION qui font évidemment écho à l’actualité et nous tient éveillé.

A Coutances, il faut prendre les petites rues de traverses pour les voir. Les collages sont discrets, les  emplacements choisis. Je sors d’un porche, et là, sur le mur juste en face, une portion de cercle jaune comme un demi-soleil. Je ne lis pas bien ce qui est écrit en bleu. En rentrant chez moi, je comprends que c’est de l’allemand : IN DEN WOLKEN qu’on peut traduire par DANS LES NUAGES. Nous sommes au début du printemps et en découvrant ce nouveau collage je sais que Sylvain est rentré de ses voyages. Et cela fait plaisir, comme de revoir un ami.

Au Poirier Qui Penche, il expose dehors alors il l’écrit sur l’espace vitrée de la galerie en occultant l’intérieur.

DEHORS comme une invitation à sortir de nos maisons pour aller voir ce qui s’y passe : Les paysages, la ville ou le monde dur et violent qu’on nous décrit dans les journaux.

DEHORS, j’entends aussi : Allez-vous-en ! Laissez-moi tranquille !

D’ailleurs il suffit d’ouvrir la porte de l’espace d’exposition pour que le mot HORS apparaisse. Faut-il comprendre que lorsque nous franchissons le seuil de nos maisons pour y entrer nous serions hors du monde, dans une situation de repli ou de refus ou bien peut-être existe-t-il dans nos intérieurs, cachés, d’autres mondes que chacun se construit comme une sorte de refuge ? 

LPQP, texte de l’exposition, août 2023

Vues de l’exposition

Vernissage de l’exposition

Accrochage en cours

Affichages libres, Coutances, août et septembre 2023

Photographies : sp38

Coutances – Berlin

Affichages libres, août 2023, photographies : LPQP et sp38

Coutances – Paris Belleville

Affichages libres,, août 2023, photographies : LPQP et sp38

Coutances – Granville

Affichages libres,, août 2023, photographies : LPQP et sp38

LPQP 6

Vernissage de l’exposition, jeudi 1er juin 2023.

Photographies : Sanda Voïca

Louis-Marie Catta est né en 1953 à Montréal.

Il vit et travaille à Notre-Dame de Cenilly depuis 1980.        

Après des études de paysagiste, Louis-Marie Catta engage une recherche artistique basée sur la notion d’aménagement d’un espace. Il réalise des sculptures et des œuvres dans l’espace public. Le végétal, le paysage, le     parcours du regardeur, l’interaction entre l’œuvre et son environnement sont alors au cœur de ses préoccupations. En 2012 il intègre un nouveau paramètre à sa recherche artistique : le jardin en créant Le Jardin du Revers.

« J’ai commencé ce jardin il y a quarante-deux ans. A l’époque, j’avais terminé mes études de paysagiste. J’ai modelé cet espace pour mes proches et pour moi-même. J’y ai apporté de la terre, planté des arbres et des arbustes qui sont aujourd’hui en pleine maturité.

Ma vie s’est longtemps partagée entre Paris et mon activité d’artiste plasticien, et ce jardin où je venais fréquemment me ressourcer et travailler dans la grange transformée en atelier.

Fin 2013, j’ai décidé d’aller plus loin et de faire de ce jardin une œuvre. De mêler ce jardin à mon parcours d’artiste plasticien, d’y introduire de nouvelles formes, d’autres matières, des  végétaux différents, et de l’ouvrir au public. »  LMC

Les œuvres présentées au Poirier qui Penche, ont été réalisées entre 2012 et 2023. Elles entretiennent toutes un lien particulier avec le Jardin du Revers et sont, dans leur grande majorité, montrées pour la première fois au public.

La série d’impressions numériques intitulée Ce que j’ai trouvé dans le jardin déraisonnable donne le titre à l’exposition. Ces photomontages sont les premières recherches ou expériences menées par Louis-Marie Catta, en 2012, lorsqu’il décide de créer son jardin. Le premier regard posé sur le jardin est autant celui d’un artiste plasticien que celui d’un jardinier ou d’un paysagiste.

Les dessins réalisés entre 2012 et 2016 ont été des outils de réflexion, de décision et de mise en forme au moment de l’élaboration du projet.

Les plans d’ensemble en perspective axonométrique ont été voulus comme cadre directeur dans lequel l’imagination se glisse. C’est l’équivalent du canevas des musiciens qui tentent une improvisation : Il doit être à la fois rationnel et ouvert à l’interprétation. Lors de la réalisation du plan, à tout moment, une modification, un ajout, une bifurcation survient et enrichit l’ensemble. C’est à cette étape que les idées contenues dans les photomontages sont introduites. C’est à cette étape que le choix d’une gamme végétale est convoqué.

La pâte à modeler, l’aluminium miroir doré ou le treillis soudé sont des matériaux récurrents dans le travail de Louis-Marie Catta. On le voit dans les œuvres montrées ici. Au jardin, ils sont omniprésents : Le treillis soudé est agencé de manière à structurer l’espace tout en servant de tuteur aux plantes. La pâte à modeler est  présente sous forme de miettes dans une assiette près d’un plan d’eau ou en forme de cube posé sur un banc. L’aluminium miroir doré est utilisé partout, face mate ou brillante : pavements carrés, gouttières…

Le jardin est parfois en mesure de produire lui-même les formes et matériaux qui seront utilisés pour la réalisation de certaines œuvres. C’est ce qui apparaît dans la sculpture intitulée Après. Le bois provient de deux essences d’arbres morts au jardin : un orme victime de la graphiose dans les années 80 et un noyer en fin de vie dans le haut du jardin « démonté » en 2022.

Enfin, Geisha et Samouraï, deux pannes charpentières qui se font face, ont été prélevées  directement dans le jardin. Elles faisaient là  évidemment référence à la statuaire de jardin. En les déplaçant dans l’espace d’exposition et en les accrochant au mur, elles changent de statut pour devenir œuvre à part entière.

On comprend que la démarche du jardinier est singulière. En revendiquant son jardin comme œuvre, l’artiste ouvre des champs de réflexions qui sont à la fois ceux du jardin, du paysage et de l’art contemporain. En même temps il nous permet de nous interroger sur notre propre rapport aux jardins, dont la présence est traditionnellement très forte en Normandie, sur les différentes formes qu’ils peuvent prendre, sur les intentions que chacun y met et comment ils révèlent celui ou celle qui le font.

https://louis-marie.catta.fr/

instagram.com/le_jardin_du_revers

Ce que j’ai trouvé dans le jardin déraisonnable, 2012

Impression numérique sur papier nid d’abeille marouflée sur contre-plaqué.

Ce que j’ai trouvé dans le jardin déraisonnable, 2012 (détail de l’installation)

Impression numérique sur papier nid d’abeille marouflée sur contre-plaqué.

Vue de l’exposition

Impression numérique d’après dessin original à la mine de plomb sur papier Canson réalisé en 2012, 50 x 64,5 cm

Impression numérique d’après dessin original à l’encre sur calque réalisé en 2016, 50 x 64,5 cm

impressions numériques noir et blanc d’après dessins originaux réalisés en 2012, 30 x 42 cm

Geisha et Samouraï, 2020

Pannes charpentières, 50 x 8 x 23 cm

Sans Titre, 2023 Treillis soudé, pâte à modeler,  240 x 115 x 20 cm

Sans Titre, 2023 (détail) Treillis soudé, pâte à modeler,  240 x 115 x 20 cm

Après, 2023

Treillis soudé, bois d’orme, bois de noyer, chiffons, peinture dorée, 320 x 25 x 86 cm

Chemin de lettres pliées, 2023

Aluminium miroir doré, 170 x 44 x 15 cm

LE JARDIN DERAISONNABLE

De Gilles Clément, on connaît le jardin en mouvement, le tiers-jardin ou le jardin planétaire. Louis-Marie Catta dit du sien en 2012, qu’il est déraisonnable.

Ce que j’ai trouvé dans le jardin déraisonnable est le titre d’une série d’impressions numériques présentées pour la première fois au Poirier qui Penche. Elles sont le résultat d’expériences, de tests, qu’il a mené dans son jardin avant d’en dessiner les plans et d’en concevoir le projet. C’est le premier regard posé sur son jardin.

Alors qu’est-ce qu’un jardin déraisonnable ? L’est-il encore ? Cherche-t-il à le raisonner ?

J’ai vu le jardin à la sortie de l’hiver. Les miscanthus ont séché et sont maintenus en fagot pour les protéger du froid. La monnaie du pape n’a pas été coupée et s’est certainement essaimée quelque part. Une euphorbe morte au cours de l’été trop sec dresse en bouquet ses tiges dénudées et sera conservée et intégrée telle quelle à la composition du jardin qu’on verra cette année. Enfin et surtout, des boutons d’or1 partout. Ils couvrent tout le jardin. Leur présence est si forte que Louis-Marie se demande toujours avec un peu d’inquiétude si les vivaces pourront retrouver leur place et surtout s’ils vont bien disparaitre après avoir fleuri comme ils le font chaque année. Les boutons d’or révèlent ce qu’est ce jardin : un espace prélevé sur les champs alentours. Car à 27 ans, Louis-Marie a volontairement choisi cet endroit caractéristique du bocage, assez rude et qu’il y vivrait. Pas de paysage pittoresque, de vue grandiose. C’est en tant que militant d’une part qu’il s’est posé là et c’est surtout en exilé ou en déraciné qu’il l’a fait. Vouloir juste un endroit à soi où se poser.

Et il plante les premiers arbres.

Tout autour du jardin donc, des pâtures et des champs cultivés : du maïs que l’agriculture fait monter à 2,5 mètres. Voilà ce qu’il ne veut pas voir, ce contre quoi il lutte. Ces paysages sont les résultats de décisions politiques, des remembrements successifs, qui les transforment eux et les hommes qui y vivent. Alors il en prélève un morceau, construit un îlot de résistance, son enclos : c’est la définition même du jardin. Pour dire qu’il y a d’autres façon de travailler la terre qu’on habite et dont on dépend, que le monde ne peut pas se réduire à ces ordres imposés et violents. Il laisse pousser les haies bocagères, construit des palissades et des brise-vents qui sont aussi des brise-vues dans lesquels s’il ménage parfois de petites fenêtres, c’est pour nous montrer juste une image du paysage du dehors. Celle par exemple du seul arbre resté dans un champ. Tout le reste, il l’occulte, il n’en veut pas, ça n’est pas son monde. Ni le monde dans lequel il veut vivre, ni celui qu’il veut nous montrer.

Le jardin de Louis-Marie Catta se visite de mai à septembre, les floraisons s’enchaînent, chaque chose a sa place. Toutes les caractéristiques d’un jardin y sont : clôtures, allées, bancs, rapport au temps et à la promenade… Un jardin ordinaire dirait Anne Cauquelin2. Pourtant, que penser du serpent de bois suspendu dans les arbres, du magnifique brise-vent au fond du jardin ? Qu’est-ce que le pendule accroché au-dessus du plan d’eau ? Pourquoi ce cube de pâte à modeler laissé sur le banc ?

Pour qui sait le voir, le Jardin du Revers n’est pas un jardin ordinaire. D’ailleurs, Louis-Marie Catta nous le dit : c’est une œuvre d’art.

Avec cette déclaration, ça se complique et oblige à un autre regard et questionne : Qu’est-ce que ce jardin ? Quel sens ça a aujourd’hui de faire un tel jardin ? Comment le fait-on ?

De ses études de paysagiste, Louis-Marie Catta a gardé la notion d’aménagement d’un espace pour le questionner dans le champ de l’art contemporain à travers des sculptures et des œuvres dans l’espace public. Le végétal, le paysage, le parcours du regardeur, l’interaction entre l’œuvre et son environnement sont alors au cœur de ses préoccupations.

En 2012, il intègre un nouveau paramètre à sa recherche artistique : le jardin. C’est à ce moment que s’opère le glissement : Il faut alors comprendre que l’œuvre qu’il réalise, celle qui est donnée à voir est le jardin lui-même. Un jardin augmenté d’une dimension supplémentaire qu’on pourrait nommer jardin-œuvre ou œuvre-jardin et qui contient ou réunit l’ensemble de son parcours artistique. Le jardin fait œuvre tout autant qu’il en est une.

Cette nouvelle recherche interroge simultanément deux catégories esthétiques (l’art des jardins et l’art contemporain) dans un contexte politique et social lié aux questions environnementales et à l’impact anthropique sur le vivant. En faisant de son jardin une œuvre, l’artiste interroge nécessairement le temps, l’achèvement de l’œuvre et pose la question du processus de création, du geste artistique et de ses conséquences, de sa responsabilité en tant qu’artiste et en tant qu’homme. Il interroge en même temps le statut de l’œuvre d’art et de l’exposition.

Ce qu’il nous donne à voir dans son jardin, c’est une forme qui historiquement pourrait s’inscrire dans ce que Rosalind Krauss appelle le champ élargi de la sculpture. Plusieurs catégories visuelles s’opposent et se combinent : la peinture (si on considère comme Kant que l’art des jardins appartient à « l’art de l’apparence sensible » comme la peinture), la sculpture et le paysage. L’œuvre-jardin se définirait en creux. Construit en réaction à son environnement comme un non-paysage, à Revers. On verrait donc dans l’enclos du jardin, le revers du paysage.

Cette forme est pensée et construite avec des végétaux, avec des matériaux qui sont autant ceux du sculpteur que du jardinier (de la pierre, du sable, du bois…) et des éléments sculpturaux qui peuvent aussi être par exemple des supports pour plantes grimpantes. Tous ces éléments de nature différente ne sont pas hiérarchisés, ils sont constitutifs d’un tout. Ils sont imbriqués les uns aux autres et manipulés avec le même soin, la même attention. Tous peuvent être vus séparément pour ce qu’ils sont et participent de la composition ou de l’arrangement de l’œuvre-jardin.

Une nouvelle manière de travailler s’impose. Un travail du quotidien qui révèle la coïncidence entre la pratique artistique et le travail du jardinier qui demandent ici, l’un et l’autre, une grande constance. Dans son jardin, Louis-Marie Catta y est tous les jours. Il le connaît par cœur : « Rien ne m’échappe. » dit-il. Mais on pourrait aussi entendre : Tout pourrait m’échapper ! Car la forme désirée est sans cesse remise en cause par la nature même du matériau qu’il emploie avec lequel il lui faut collaborer. C’est ce que Gilles Clément appelle « le partage de la signature ». Alors, plutôt que de chercher à maîtriser l’incontrôlable, Louis-Marie Catta passe par l’observation, c’est pour cela qu’il peut dire que rien de ce qui se passe dans son jardin ne lui échappe. Il accepte le hasard, accueille l’imprévu comme cette grande berce du Caucase apportée par le vent. On ne parlera pas de lutte ou de combat mais de choix et de travail. Le problème est de trouver le juste équilibre entre intervention et laisser faire et de se questionner en permanence quant aux gestes qu’on fait et à leurs conséquences : tailler ou non, désherber ou pas ? On pourrait parler d’éthique pour qualifier cette attitude. D’ailleurs, il ne nettoie jamais son jardin, s’il emploie le râteau (outil de nettoyage du jardinier), il l’utilise comme un crayon pour dessiner des motifs sur des surfaces sableuses.  Ainsi au Jardin du Revers se côtoient des végétaux qui viennent du monde entier, choisis pour leur forme propre, la couleur de leur feuillage ou leur floraison et des plantes endémiques comme la molène, la digitale, la prêle ou l’euphorbe réveille-matin qui y poussent naturellement. Ici, toutes méritent la même attention, elles sont protégées et soignées.

Cette œuvre, on le comprend, est évidemment changeante et mouvante au cours du temps. Et ce, aux différentes échelles du temps : les décennies, l’année, la saison, la journée, la seconde… Car tout concours à la constitution de l’œuvre : le soleil, le vent, le passage des animaux qui peuvent bousculer les choses… Le contentement du jardinier est peut-être fugace mais le regard de l’artiste est la quête permanente de ces instants.

Le parcours dans le jardin et son agencement avaient initialement été pensés au sortir de la maison. Mais l’ouverture au public a modifié cette organisation. Une brèche dans la haie a été pratiquée et on accède maintenant par un escalier à ce qui était le fond du jardin, ou plutôt son cœur. C’est en partie de là que lui vient son nom : le Jardin du Revers. Aussi, quand nous entrons dans le jardin, nous y entrons littéralement, nous y sommes, dedans. Avec la même proximité que l’homme qui y œuvre. Car le jardin, nous ne l’avons pas dit, n’est pas très grand, il est à échelle humaine. Le grandiose, le sublime ce n’est pas son affaire. Alors les questionnements qui sont ceux de Louis-Marie Catta, sur son rapport au monde et au vivant nous les faisons nôtres.

Le jardin du Revers : On pourrait entendre aussi le jardin rêvé ou le jardin du rêve. Une sorte de paradis. Autre définition du jardin qui désigne en ancien persan « un endroit verdoyant » et qui fait dire à Derek Jarman en parlant de son Dernier Jardin dans le Dungeness et que Louis-Marie pourrait dire également en parlant du sien : « Le paradis hante tous les jardins mais seuls certains jardins sont des paradis. Le mien fait partie du nombre. »

Assurément, le Jardin de Louis-Marie Catta est déraisonnable, complexe, chargé de doutes, d’espoirs, d’inquiétudes et de beauté.

Texte de l’exposition, Le Poirier Qui Penche, Coutances, juin 2023

1  En réalité, il s’agit de la Ficaire (Ranunculus ficaria) mais je conserve ici l’appellation bouton d’or pour l’image qu’on a  certainement tous d’un champ couvert de ces fleurs dont la couleur est dite dans le nom et qui me semble décrire parfaitement le jardin à ce moment-là de l’année.

2  Anne Cauquelin est philosophe, romancière et artiste plasticienne. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages sur l’art contemporain (le « Que sais-je ? » sur l’art contemporain, c’est elle) et s’est interrogée sur les spécificités du jardin, dans Petit traité du jardin ordinaire. En 2010, elle s’intéresse au projet du Jardin du Revers. Une correspondance nourrie de textes et de réflexions permet à Louis-Marie Catta de réfléchir son jardin et sa démarche de plasticien au moment de sa conception.

Vues du Jardin du Revers, 2023

La Table Inutile, Jardin du Revers, 2023

Vues du Jardin du Revers, 2023

Brise-vent, Jardin du Revers, 2023

Rencontre avec l’artiste au JARDIN DU REVERS, vendredi 30 juin

LPQP 5

sans titre, 2023, Virginie Hervieu

Sans titre, 2022
Laine, 70 x 200 x 8 cm

Au sol
Sans titre, 2022
Laine, 50 x 48 x 33 cm

Virginie Hervieu est née en 1970 à Mortain.

En 2021, après vingt-cinq années passées à Marseille, elle fait le choix de revenir dans sa région d’origine. Désormais, elle vit et travaille à Coutances.

Le Poirier qui Penche et Bouillons Kub à Orval s’associent pour la première fois autour d’un même artiste ; une manière de montrer les connivences ou la parenté intellectuelle qui existent entre ces deux structures qui défendent l’une et l’autre l’art contemporain dans le Coutançais.

Le Poirier qui Penche présente des œuvres récentes issues d’une recherche sculpturale basée sur l’expérimentation avec une attention toute particulière à la matière dont les qualités génèrent l’œuvre, la forme n’étant pas pensée à priori. En découlent des œuvres qui se jouent des anciennes catégories identifiables de la peinture et de la sculpture. Une recherche artistique qui s’inscrit dans une filiation historique telle que l’Arte povera ou l’Antiform mais plus particulièrement dans le mouvement post-minimal que Lucy Lippard intitule « Eccentric-Abstraction » où elle démontre que les artistes femmes ont été et sont essentielles dans la redéfinition et l’ouverture des catégories visuelles et théoriques du XXème siècle.

Un héritage revendiqué qui se caractérise chez Virginie Hervieu, selon Marie Adjedj par « une double réflexivité qui entremêle recherches formalistes et préoccupations extrinsèques dont la portée est politique et sociale (ici problématiques matériologiques et rhétorique du féminin) ».

virginiehervieu.wordpress.com

instagram.com/virginie_hervieu

                                                                

A Bouillons Kub, une installation intitulée Collection occupe une des faces intérieures du cube. Elle réunit des éléments hétérogènes qui sont des échantillons de matériaux, des résultats d’expérimentations, des ratages, des restes, des objets trouvés ou matières récupérées soigneusement conservés pendant plus de vingt ans.
A l’exception des objets récupérés (semelles de chaussure, chewing-gum, bonnet de bain, bois, os, coquillages, etc.) et des outils ou ustensiles (pinceaux usagés, louches, cuillères, chiffons, serpillères, gants…), on retrouve dans Collection la gamme matériologique spécifique au travail artistique. Des matériaux à caractère hybride, malléables, mous, des matériaux privilégiés pour leur capacité à changer d’état : des plastiques ou polymères (polyéthylène, polystyrène, polyacryamide, caoutchouc synthétique…), de la laine, des algues, du verre, du tissu, de la paraffine, de l’huile… Les éléments rassemblés dans cette œuvre portent également la trace des tests, des manipulations, des processus, des gestes effectués pour les transformer (tissage, repassage, enroulement, pliage, empilage, nouage…). Mais Collection n’est pas seulement la mémoire de ces matériaux et de ces expérimentations c’est également une ressource, un lexique, un outil de travail, un réservoir de formes disponibles. Par ailleurs la durée de la réalisation de cette œuvre qui s’étend sur plus de vingt ans est un élément indissociable de sa construction. C’est une œuvre mouvante ou changeante, instable à la fois dans la nature des matériaux dont les transformations proviennent aussi de phénomènes entropiques (modification des couleurs, émiettement, durcissement…), dans la quantité d’éléments dont le nombre évolue par addition ou soustraction et dans leur agencement qui est rejoué chaque fois qu’elle est montrée puisque la répartition des éléments est arbitraire provoquant de nouveaux rapports visuels et chromatiques.
Collection occupe ainsi une place singulière au sein d’une démarche et d’un parcours artistique jouant de statuts multiples, à la fois œuvre à part entière, matrice et mémoire d’une activité artistique.

Détail de l’installation, Bouillons Kub, Orval-sur-Sienne

Photographie Arsor

Vue de l’exposition Collection, Bouillons Kub, Orval-sur-Sienne

Texte des expositions : 2023.03.16. Sanda Voïca sur Virginie Hervieu  – Celle qui réinvente l’amour chaque jour

Notice bio-bibliographique

Sanda VOÏCA est née en Roumanie en 1962. Après des études à la Faculté de langues étrangères de Bucarest elle est professeure de roumain et russe (1985-1990) et correctrice et rédactrice pour les plus importantes revues littéraires roumaines. Son début éditorial en roumain, avec Le diable a les yeux bleus,éd. Vinea, Bucarest, 1999.

À partir de 1999 elle s’installe en France et écrit exclusivement en français. Publication de poèmes dans plusieurs revues françaises, parmi lesquelles : Place de la Sorbonne, Terre à ciel, Phoenix, Sarrazine, Verso, Décharge, Lettres Capitales, Traversées (Belgique), Moebius(Canada).

Plaquettes publiées : Des couleurs en profondeur, éd. du Petit flou, 2016 ; Et quelle volonté peut-on comparer avec celle de l’amour ?, Les Presses du vide, 2011.

Livres de poésie : Exils de mon exil, éd. Passage d’encres, 2015 ; Épopopoèmémés, éd. Impeccables, 2015 ; Trajectoire déroutée, éd. LansKine, 2018 ; Les nuages caressent la terre, éd. Les Lieux Dits, 2022.

Livres à venir en 2023 (publication imminente et / ou contrats signés) : L’ère de santé, Atelier rue du soleil ; Empreintes sans terre, éd. Littérales ; Nigoun avec paroles, éd. Unicité ; Poèmes de mes mains, éd. du Cygne.

A créé et a été la rédactrice en chef de la revue Paysages écrits entre 2010-2018 (30 numéros).

EXPOSITIONS 2022

LPQP 4

Sans titre, 2022
Crayon Caran d’Ache et mine de plomb sur papier Fabriano, 195 x 60 cm, chacun 

Peter Bolli est né en 1960 à Lugano (Suisse).

Il vit et travaille à Agon-Coutainville .

Après des études en arts appliqués à la CSIA de Lugano, il se spécialise dans la restauration de bâtiments historiques et plus particulièrement dans le travail de la chaux et la restauration de fresques. Il vit durant cette période parfois en Suisse, parfois en France jusqu’à cette année où il décide de s’établir définitivement à Agon.

Il poursuit un travail photographique en parallèle de son activité d’artisan d’art, soit quarante ans de   recherches qu’il conserve et archive soigneusement sans jamais les montrer. Il photographie les paysages de ses lieux de vie (la plage d’Agon, le lac de Lugano, une haie bocagère, le havre de Regnéville…) qu’il recadre le plus souvent en recherchant ce qu’il appelle l’« abstraction ». Il photographie  également les détails de ce qui constitue ces paysages, le sable de la dune, l’eau du lac ou de la mer, la terre labourée et se construit ainsi une sorte de matériauthèque.

Peter, on l’a dit, n’a jamais (ou si peu) montrer son travail. Il le fait pour la première fois au Poirier qui Penche. L’installation photographique qu’il présente reprend l’agencement de ses fichiers d’archives qui apparaissent sous forme de vignettes sur l’écran de son ordinateur. Les petits formats sur dibon scotchés au mur s’apparentent à des objets qu’on pourrait manipuler. Ils sont ici classés par thème (les mers, les ciels, les terres).

C’est en regardant ses photographies qu’il en perçoit l’aspect pictural ou plutôt graphique. Il décide alors de construire ses propres paysages, en noirs et blancs et reprend le geste qui était le sien quand il restaurait les fresques dans les églises : des petits traits verticaux juxtaposés. En jouant sur la densité des traits et le gras des crayons, de 4H à 9B, il réalise des dessins sur de grands formats qui ne sont pas sans rappeler les dimensions d’une fresque.

Sans titre, 2022
Photographies sur dibon, L.44 cm
Tirage en série limitée numérotée sur 7

LPQP 3

Détail de l’installation
Impressions numériques sur papier Hahnemühle William Turner 310 g
Dimensions variables

Mathilde Wolff est née en 1964.

Elle étudie à l’Ecole des Beaux- Arts de Caen et de Rennes. Elle a longtemps partagé son temps entre son atelier de Paris et celui d’Agon-Coutainville. En 2021, elle décide de vivre exclusivement à Agon-Coutainville.

mathildewolff.com

https://www.instagram.com/mathilde_wolff_artiste

MIMESIS

Mon voyage au Brésil, en 2016, pour découvrir la forêt atlantique, un des plus grands réservoirs de biodiversité au monde tragiquement massacrée, m’a profondément bouleversée.

Ma pratique artistique est alors devenue engagée écologiquement. Elle vise à repenser la relation entre l’humain et la nature, à alerter nos consciences en montrant la beauté et la fragilité du monde vivant.

Ma série Na Mata initiée au Brésil s’est enrichie depuis par d’autres voyages en Amérique Centrale.

Il est question dans les œuvres présentées ici, d’une attention précise, proche de la fascination, pour des formes végétales, sujets flottants dans un paysage décomposé / recomposé.

La forêt y résonne à travers la fragilité des calques, l’effacement mais aussi la luxuriance. Strate par strate, les couches d’aquarelle et les calques découpés, comme une seconde peau, se superposent.

L’impression digigraphique vient ensuite transcender la perception.

Mon engagement se poursuit collectivement. J’ai rejoint en 2021 l’association Forest Art Project où artistes et scientifiques œuvrent et s’engagent pour l’avenir des grandes forêts. J’adhère également au grand projet du botaniste Francis Hallé, pour la renaissance d’une forêt primaire en Europe de l’Ouest.

Forest Art Project 

En 2012, les artistes Vincent Lajarige et Mark Alsterlind retrouvent Francis Hallé au Gabon, sur le tournage du film il était une forêt.

Leur sensibilité commune pour les grandes forêts primaires les incite à proposer une œuvre collective, un voyage en forêt, qui s’accompagne d’un volet pédagogique avec films et conférences.

Notre association accueille désormais une vingtaine d’artistes, de nombreux scientifiques et philosophes, tous engagés pour l’avenir des grandes forêts.

À l’initiative du botaniste Francis Hallé, l’association agit pour la création d’un vaste espace dans lequel une forêt intacte évoluera de façon autonome renouvelant et développant sa faune et sa flore sans aucune intervention humaine et cela sur une période de plusieurs siècles !

http://www.forest-art-project.fr

https://www.foretprimaire-francishalle.org/

Bromélias Cloud Forest Mombacho – Nicaragua 4
Impression digigraphique sur papier Hahnemühle W Turner 310 g
120 x 80 cm encadré 

LPQP 2

Comète, installation de Sophie Hutin et intervention musicale de Francis Bodu, Robert Cavanna et Sophie Hutin pendant le festival Jazz sous les pommiers

Sophie Hutin est née à Paris en 1964.
Elle vit et travaille à Agon-Coutainville depuis 2010.

Sophie Hutin est artiste plasticienne. Contempler et observer, récolter et prélever des matériaux dans son environnement immédiat et quotidien (algues, cordages de pêche, bois flotté, fil de fer…) amorce le processus de création nécessaire à toutes ses œuvres : dessins, sculptures, installations ou manipulations théâtralisées.
Avec des gestes simples et archaïques, répétitifs, comme tracer, graver, piquer, tresser, coudre, rafistoler, elle expérimente et transforme ces matériaux collectés et altérés.

Sophie le dit rarement mais elle est aussi musicienne amateure. Elle fait partie de l’Atelier Jazz de Regnéville-sur-Mer et de l’Orchestre d’harmonie de Coutances. Cette activité est aussi son quotidien et influence également sa pratique artistique dans les formes qu’elle génère ou dans les installations qu’elle crée.

Pendant le festival Jazz sous les Pommiers, Le Poirier qui Penche propose donc de lire le travail de Sophie Hutin sous cet angle particulier et intimiste qu’est la relation que l’artiste entretien avec la musique et son instrument privilégié, la clarinette.

instagram.com/sophie_hutin

Comète, 2009
Pastilles de papier, épingles, dimensions variables

Les îlots, 2008
Terre, pigments, fils de cordage de pêche colorés, dimensions variables

Les îlots, 2008 (détail)

Chiendent, 2005
Plomb olive, fer recuit, fils de cordage de pêche, dimensions variables

LPQP 1

Lire la suite: Le Poirier Qui Penche

2021

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